par Salim el Hoss article original
En ces temps troublés au Proche-Orient où certains croient pouvoir résister à l’usurpation sioniste en tuant des civils et où d’autres sont prêts à nier les droits spoliés des Palestiniens, il faut redire ce qui est légitime et ce qui ne l’est pas. C’est ce à quoi s’emploie l’ancien Premier ministre libanais Salim el-Hoss. Il nous rappelle que le désespoir n’autorise pas le crime et que la force n’est pas le droit. Depuis la création de l’État d’Israël fondé sur une usurpation, la guerre menée par le sionisme contre la Palestine est une guerre contre des civils sans défense. Le peuple palestinien, qui n’a jamais été agressif ou usurpateur, est soumis à une agression permanente, dirigée contre sa terre, sa liberté, sa dignité, mais aussi son devenir. Dès son apparition, le projet sioniste a été un projet d’agression contre un peuple pacifique, destiné à le déraciner de sa terre pour installer à sa place des colons juifs venus de toutes les régions du monde. Cela a abouti à l’établissement de l’ « État d’Israël » sur une terre arabe qui a été vidée de la plupart de ses habitants ; les survivants ont fui dans les régions arabes voisines et vivent dans des camps de réfugiés, beaucoup sont partis pour se disperser aux quatre coins du monde.
Depuis la création de l’État usurpateur, l’agression sioniste n’a pas cessé et Israël a poursuivi son extension au détriment des Arabes de Palestine, se livrant en continu à des opérations de meurtre, de destruction, d’expulsion effrénées. Cette situation dramatique a donné naissance à des mouvements de résistance populaire en Palestine et dans les régions voisines, mouvements qui défendaient une identité et un devenir. Et dans le ciel de la confrontation avec l’ennemi sioniste, deux étoiles ont brillé : la Résistance palestinienne, impliquée dans diverses activités, et la Résistance libanaise, coalition de partis et d’organisations dont le Hezbollah est aujourd’hui la colonne vertébrale.
Nous devons garder à l’esprit que la Résistance arabe est —et reste— un mouvement de légitime défense face à une agression brutale sans limites. La légalité internationale, représentée par les Nations Unies et le Conseil de Sécurité, n’a pas joué un rôle effectif pour protéger les Arabes de la région qui étaient visés, stopper l’agresseur ou mettre une limite à ses débordements insensés. Il ne s’offrait donc d’autre choix que la Résistance, dans l’espoir de libérer un jour la terre usurpée. La question reste posée : quelle méthode, quels moyens pour la Résistance ? Quelles limites ne doit-elle pas franchir ? Il est inconcevable d’absoudre le meurtre, parce que l’âme détruite l’est à tout jamais, sans retour. Le meurtre est un péché capital, il n’est permis qu’en cas de légitime défense, ou pour défendre sa famille, sa communauté, sa nation et, dans ces cas-là, il n’est permis de diriger son arme que contre l’agresseur ; quant au fait de tuer des civils sans défense, c’est un crime ignoble, quelle que soit l’identité ou l’appartenance des victimes. Invoquer l’excuse selon laquelle un civil désarmé dans le camp ennemi est un combattant en puissance, si le conflit s’exaspérait ou s’il pouvait détenir des armes et s’entraîner, est une logique qui, si on ne la combat pas rigoureusement, risque de finir par anéantir les valeurs humaines que sont censés respecter ceux qui sont attachés à ces valeurs et à la crainte de Dieu.
Dans ses rapports avec les Arabes, l’ennemi sioniste ne s’impose pas de limites pour perpétrer des crimes contre les droits humains. Les Palestiniens et les Libanais ont souffert, tout comme, dans le passé, ont souffert les Égyptiens et les Jordaniens ; ils ont enduré les pires souffrances en raison des barbares agressions sionistes qui visaient —et visent encore— le Proche-Orient arabe, c’est indéniable. Mais le meurtre en dehors du cadre de la légitime défense reste un crime impardonnable. Le crime ne répond pas à un autre crime, le meurtre ne justifie pas le meurtre, quelle que soit leur identité et leur appartenance, les civils désarmés ne doivent être le prix à payer pour répondre à une agression brutale.
La position des Arabes vis-à-vis d’ « Israël » a évolué. Pendant des années, nous avons écouté avec complaisance un discours qui appelait à libérer la Palestine et à jeter à la mer les juifs qui en accaparaient la terre. Avec le temps, sous la pression internationale et devant l’absurdité des confrontations militaires avec une armée supérieure bénéficiant d’un soutien international, un changement est apparu dans la position arabe. Désormais certains d’entre nous aspirent à une soi-disant paix à tout prix, certains de nos gouvernants s’emploient à obtenir un compromis, même injuste, sous des appellations séduisantes, telle l’initiative de paix arabe. Cette logique nouvelle a engendré un courant grandissant qui est hostile à la Résistance et la dénigre à tort. Mais la grande majorité de l’opinion publique arabe reste fidèle à son soutien à la Résistance légitime, comme on l’a vu, du Maghreb au Proche-Orient, lors de l’agression sioniste contre le Liban au cours de l’été 2006, avec les manifestations de solidarité avec la Résistance, ainsi que lors de la dernière agression barbare contre Gaza, avec le soutien populaire et médiatique dans tout le monde arabe, en solidarité avec le peuple de Gaza.
La guerre d’Israël contre le Liban puis contre Gaza, c’est la poursuite de la guerre menée par la voyoucratie sioniste contre les civils. Dans l’un et l’autre cas, la Résistance a été victorieuse grâce à sa ténacité légendaire face à la force la plus brutale du Proche-Orient soutenue par les plus grandes puissances mondiales. La Résistance, c’est la légitime défense, et les peuples arabes ont payé très cher pour se défendre, défendre leur existence, leur avenir et leur dignité. En même temps, la Résistance n’est pas forcément synonyme d’action armée. La Résistance peut être pacifique, elle peut se traduire par le boycott réfléchi d’Israël et de tout ce qui s’y rapporte, par l’intensification de campagnes internationales sur le plan politique et diplomatique, dans les domaines de l’information et de la mobilisation, par des interventions auprès des instances internationales chargées des droits de l’homme, de la justice et de la légalité internationale.
Au sujet du changement de point de vue dans le camp arabe sur le conflit arabo-israélien, nous pensons que le règlement de la question palestinienne réside dans la restauration de l’unité de la Palestine, de la Méditerranée au Jourdain, et le retour en Palestine, toute la Palestine, des réfugiés, tous les réfugiés, dans leurs maisons dont ils ont été chassés. Il n’est pas question de jeter les juifs à la mer, loin de là. Au contraire nous appelons à la coexistence entre les Arabes et les juifs dans une patrie commune. Si cela devait pousser certains juifs à partir, c’est leur affaire. Si cela se traduisait après-demain par la fin de l’émigration juive de l’étranger vers la Palestine, ce serait tout à fait naturel et légitime. Si cela mettait un terme aux investissements en Israël, c’est ce que nous souhaitons. Le règlement de la question de la Palestine réside dans la résolution 194 des Nations Unies qui garantit aux réfugiés le droit au retour.
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